Charte des Musiques
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Billet d’humeur : Est-ce trop demander que de la cohérence ?

Depuis les pre­mières restric­tions d’activité des salles de spec­ta­cle, le 9 mars, les annonces prési­den­tielles et gou­verne­men­tales con­cer­nant les activ­ités artis­tiques et cul­turelles s’en­chaî­nent de manière erra­tique.

Com­ment peut-on affirmer le 16 avril que de « petits fes­ti­vals » pour­raient se tenir à par­tir du 11 mai, comme si ces mil­liers d’événements étaient en mesure de s’adapter d’un jour à l’autre à de nou­velles con­di­tions d’ac­cueil, alors qu’aujourd’hui la qua­sito­tal­ité des fes­ti­vals d’été est annulée et que les fes­ti­vals d’au­tomne n’ont à ce jour aucune vis­i­bil­ité quant aux con­di­tions de leur tenue ?

Com­ment peut-on annon­cer le 15 mai que la Fête de la musique aura bien lieu, que les parcs à thèmes et les lieux de cultes rou­vrent, alors que l’ensemble de nos étab­lisse­ments sont fer­més au pub­lic, qu’aucun ate­lier de pra­tiques artis­tiques de prox­im­ité n’est autorisé, qu’aucune équipe artis­tique n’a pu réelle­ment repren­dre son activ­ité, et que la plu­part des salles de spec­ta­cle ou de con­cert n’envisagent aucune reprise pos­si­ble de la dif­fu­sion avant jan­vi­er 2021 ?

Com­ment peut-on inter­dire les événe­ments de plus de 5.000 per­son­nes jusqu’au 1er sep­tem­bre, les regroupe­ments de plus de 10 per­son­nes jusqu’au 2 juin, sans lim­i­ta­tions inter­mé­di­aires à venir, et rou­vrir le Puy du Fou ?

Com­ment peut-on faire de telles annonces alors qu’elles sont en totale con­tra­dic­tion avec les pro­to­coles san­i­taires pro­mus par le min­istère de la Cul­ture pour l’ensemble des pra­tiques artis­tiques et cul­turelles, pour la tenue des fes­ti­vals et la réou­ver­ture des lieux au pub­lic ?

Com­ment peut-on être autant décon­nec­té de nos réal­ités pro­fes­sion­nelles, de nos cal­en­dri­ers, de nos out­ils de tra­vail ?

Com­ment peut-on annon­cer le 6 mai des mesures pour la cul­ture (pro­lon­ga­tion des droits pour les inter­mit­tents du spec­ta­cle, com­man­des publiques mas­sives pour les créa­teurs…) et n’en n’avoir, trois semaines après, aucune tra­duc­tion con­crète ?

Com­ment peut-on « refonder une ambi­tion cul­turelle pour la France » en « libérant les éner­gies créa­tri­ces et en don­nant aux artistes con­fi­ance et vis­i­bil­ité » sans qu’au­cune mesure sérieuse de poli­tique publique ne soit prise ?

Com­ment peut-on annon­cer pour le secteur cul­turel 50 mil­lions d’euros par-ci, 5 mil­lions par-là, alors que le tourisme, forte­ment dépen­dant de nos activ­ités, se voit pro­pos­er une enveloppe de 18 mil­liards ?

Com­ment peut-on si peu con­naître les domaines de la cul­ture qui sont faits de pro­fes­sion­nels, organ­isés et struc­turés ? Com­ment peut-on nous traiter comme des amuseurs publics, des histri­ons égo­cen­triques vivant par et pour leur pas­sion, alors que nos activ­ités ont un poids économique direct de 47,5 mil­liards d’euros, soit 2,2 % de l’économie française et 2,4 % de sa pop­u­la­tion active ?

Com­ment peut-on tenir aus­si peu compte des arts et de la cul­ture, quand ils s’appuient sur les droits humains fon­da­men­taux et revendiquent l’émancipation des per­son­nes et de le développe­ment de leurs capac­ités ? Com­ment peut-on priv­ilégi­er la rentabil­ité économique et les seules indus­tries au détri­ment de la mul­ti­plic­ité de forces citoyennes au ser­vice de l’intérêt général ?

Vos annonces dis­til­lées au compte-goutte, con­tra­dic­toires et inco­hérentes épuisent les acteurs, ajoutent de la con­fu­sion à la sit­u­a­tion, de la dés­espérance à la frag­ili­sa­tion.

Souhaitez-vous vrai­ment que le monde des arts et de la cul­ture sorte de cette crise ? Alors, faites-le avec nous, pas con­tre nous !

Com­mu­niqué du 26 mai 2020
Plus d’informations : UFISC — coordination@ufisc.org